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Note de l'auteur: Cet article a été déjà publié en novembre 2012 sous le présent titre mais également sous celui de La Palestine pour ne plus oublier. Cette version a été légèrement revue en y insérant notamment deux éléments qui nous semblent pertinents. Le premier est le "prétexte" invoqué de l'usage par la Syrie d'armes chimiques pour hâter une intervention militaire dans ce pays et le détruire pour ne plus parler du Golan. Cette option de l'intervention militaire occidentale en Syrie a été notamment portée, depuis longtemps et avec ardeur, par l'actuel Ministre Français des Affaires Étrangères. Le second est la destitution par les armes et dans le sang du Président légitime de l’Égypte Mohammed Morsy. Ces deux éléments participent d'une même doctrine qui prône le démembrement du monde arabe et musulman voulue également par les États-Unis d'Amérique sous la pression des différents lobbies qui en orientent et en définissent actuellement la politique étrangère.
L’humanité doit continuer d’être amnésique et sa
mémoire sélective. La Palestine est devenue la note discordante d’une partition
inachevée. Une partition planétaire dont nous entendons déjà quelques morceaux
choisis. Et les négociations en cours n’y changeront rien. Du rôle d’acteur
majeur du conflit du Proche-Orient revendiquant des droits légitimes dont celui
de disposer d’un état dans des frontières internationalement reconnues, les
palestiniens pourraient se voir attribuer des miettes dans une séquence déjà
réglée d’avance et bénie par ce qu’on appelle encore la puissance américaine.
La reconfiguration géographique du Proche-Orient se met déjà en marche.
Elle pourrait se construire sur le
démembrement des pays qui le composent. Grâce aussi à la complicité active de
certains régimes en place. Lorsque
des Etats et les pouvoirs qui les incarnent, qu’ils soient d’émanation
démocratique où d’essence autoritaire, se brouillent entre eux, c’est que les
différents qui les opposent deviennent insurmontables et que les petits
arrangements entre amis ne suffisent plus à rétablir la confiance. Il faut
alors choisir, s’entendre malgré les turbulences internes qui s’annoncent ou
éliminer le superflu pour préserver l’essentiel, c’est-à-dire sauver la paix
civile pour les uns et se maintenir coûte que coûte en situation de
responsabilité pour les autres. Les peuples imposent parfois de nouvelles
exigences et révèlent de pertinentes priorités que même les plus grands
stratèges ne peuvent anticiper. Les relations officielles peuvent aussi se
crisper et même se détériorer et les sociétés civiles, lorsqu’elles existent,
prennent alors le relais, se redéployent, retissent du lien comme on dit et
permettent à l’irréparable de ne pas se produire. L’élément humain et les
relations que peuvent construire ceux que l’on nomme improprement «les petites
gens» peuvent s’avérer indispensables à la pérennité de relations entre des
Etats. Ces observations demeurent, semble-t-il, valables aussi bien dans le cas
de relations qui lient les principales puissances du monde aux pays en
développement que dans celui de liens réguliers qu’entretiennent ces derniers
entre eux. Ainsi, depuis l’opulence des trente glorieuses, de nombreuses
puissances ont toujours privilégié les relations avec les pouvoirs en place
indépendamment des souffrances que ces derniers peuvent infliger à leurs
peuples dans des situations souvent paradoxales où peuvent se côtoyer
simultanément extrême pauvreté, corruption massive et dilapidation de l’argent
public, insolente richesse et exubérance indécente, autoritarisme et non-droit.
Pour les puissances, préserver des intérêts strictement économiques bien
identifiés, consolider une influence dans une zone géographique donnée et en
faire une chasse gardée, notamment lorsque d’autres puissances prédatrices
peuvent apparaître, auront toujours constitué les axes autour desquels se sont
articulées des situations de domination des uns et de soumission des autres.
«L’honneur étant ainsi sauf», sauf celui de peuples démunis, appauvris et
malmenés dans leur propre dignité. Ces puissances ont toujours installé,
protégé et récompensé des pouvoirs de pays pauvres avec lesquels elles ont
entretenu les meilleures relations. Un pacte du mal est ainsi scellé et les
puissances dites «civilisatrices» s’accommodent, le plus souvent au mépris de
tout ce que la conscience humaine condamne, de régimes totalitaires souvent
militaires, négateurs de toute aspiration à la liberté et de tout développement
économique. Mais cette conscience réprobatrice existe cependant. Elle s’aiguise
et finit par se dévoiler souvent par le biais de sociétés civiles qui dénoncent
ainsi abus, brimades, rapine, pauvreté, arrestations arbitraires, sévices et
tout ce que peuvent endurer des populations entières, muettes et souffrant dans
le plus assourdissant des silences. Elles dénoncent aussi et révèlent même
parfois biens immobiliers mal acquis et comptes bancaires occultes ouverts sur
leurs propres territoires. Les relations entre pays dits en voie de
développement peuvent subir elles aussi les effets pervers des contingences
internationales et des manœuvres dilatoires de grandes puissances qui
n’hésitent plus à interférer de manière insidieuse pour contenir tout
rapprochement et éviter que ces pays ne s’entendent. Il faut ainsi délégitimer
le bon voisinage, maintenir la stratégie de la tension et provoquer toujours le
pourrissement jusqu’à ce que parfois l’irréparable survienne et se produise,
comme la guerre par exemple. Cependant et dans un contexte de profusion de
nouvelles technologies et de relativisation de la notion de distance, deux
éléments fondamentaux et déterminants ont, semble-t-il, essaimé, perturbé cette
stratégie planétaire de domination des peuples, bousculé le statu quo jusque-là
maintenu par la force et l’allégeance de régimes autoritaires honnis et
réveillé les consciences encore endormies. Le premier est l’émergence d’une
crise économique mondiale qui permet de découvrir que la pauvreté la plus
extrême, comme ce fut le cas du terrible dénuement des populations noires de la
Nouvelle-Orléans révélé à la face du monde par la puissance dévastatrice de
l’ouragan Katrina, peut exister au cœur même de ces puissances économiques, la
misère n’étant plus réservée qu’aux seuls pays sous-développés, et le second
est l’avènement d’une pensée islamique politique militante et engagée qui
conteste tant dans le fond que dans la forme aussi bien l’ordre mondial
dominant, le politiquement correct que la légitimité supposée de valeurs présentées
comme universelles mais fondamentalement venues d’ailleurs. Lancinant débat
diront peut-être certains, mais nous ne le dirons jamais assez. La première
situation a permis à une partie des opinions occidentales de s’émanciper de la
pensée dédiée au culte du profit à tout prix au détriment de l’humain et de son
véritable épanouissement et de dénoncer et de combattre les puissances de
l’argent et leurs impitoyables articulations politiques, médiatiques et
militaires. La seconde a permis de mettre en avant le postulat que des peuples
souverains peuvent vivre autrement et que ce qui semble convenir à certains
peut ne pas l’être pour d’autres. Que l’universalité supposée de concepts et de
valeurs peut être contestée par d’autres, contredite par la réalité des relations
internationales et ne pas incarner le modèle idéal que l’on a toujours voulu
nous faire admettre. Et dans ce cas de figure, le concept de la régression
féconde, intelligemment développé par un célèbre sociologue algérien, puise
toute sa raison d’être et rencontre toute sa légitimité. Le coup de force
militaire en Egypte contre la légitimité du Président Morsy investi pourtant du
choix souverain exprimé par le peuple Egyptien, participe de cette volonté
manifeste des puissances mondiales d’empêcher l’avènement d’autres choix
politique et économique qui ne s’inspirent pas de la supposée universalité
incarnée par «l’occident et les valeurs qui le fondent ». Mais il se
produit parfois entre ces deux éléments « perturbateurs », l’appauvrissement
du monde occidental et ses effets libérateurs sur ses opinions, d’une part, et
l’émergence de cette pensée islamique militante et engagée, d’autre part, des
effets convergents, comme pour les processus de régulation, qui permettent de
construire des passerelles. La quête du droit, de la justice et du respect, des
uns, se réconcilie et se conjugue avec celle d’un nouveau vivre ensemble, de la
protection de la terre et de la dénonciation des puissances de l’argent, des
autres. Et les peuples découvrent, soudainement et indépendamment de leurs
différences ethniques, raciales, culturelles et religieuses, qu’ils se
ressemblent et qu’ils font face aux mêmes défis de survie et de protection
d’une terre dont les ressources sont déjà largement épuisées et qui
hypothèquent l’avenir de générations toutes entières. Mais cette jonction va
également permettre à d’autres forces de se libérer et de cristalliser autour
d’un socle réel de difficultés et de frustrations savamment métamorphosées,
comme cela se fait depuis la nuit des temps, en tout ce que l’humanité peut
renfermer de pire comme la haine, la barbarie, la dévastation, la guerre,
l’antisémitisme le plus abject qui rappelle que le ventre de la bête immonde
est toujours fécond, la haine des musulmans qui se décline maintenant sous le
doux euphémisme d’islamophobie, le racisme bête et méchant et de bien d’autres
choses encore… Mais les limites séparant ces deux versants, ces deux forces antagonistes
et antinomiques, d’une même montagne ne sont pas toujours évidentes et les
paradoxes les plus incompréhensibles peuvent se produire et les situations les
plus inattendues surgir. Ainsi, pendant que la crise économique mondiale
déploie, comme une pieuvre, ses meurtrières tentacules et prend des peuples
entiers à la gorge et que le monde arabe vacille sous les convulsions d’une
supposée révolution printanière dont on ne connaît pas encore toutes les
issues, les nouveaux inquisiteurs, eux, veillent. Il faut toujours savoir faire
diversion. Et surtout ne pas incommoder cet état, Israël, ce pays, l’un des
derniers peut-être sur terre, qui continue de bafouer toutes les lois
internationales, de défier toute la planète et de bénéficier de l’impunité et de
l’indulgence de puissances dont certaines osent venir disserter, sur nos
décombres et nos corps calcinés, d’équité, d’équilibre et de droit
international. Et de provoquer le silence des plus grandes organisations
internationales dont celui des Nations unies. Et il est tellement plus facile
de pérorer sur « l’usage supposé
d’armes chimiques par le régime syrien » pour achever la dislocation en
cours de la Syrie ! Mais pendant que les consciences ne sont pas encore
toutes éveillées et que beaucoup se taisent et deviennent complices, le peuple
palestinien, lui, peut continuer de mourir. Sa liquidation physique et son
corollaire, son anéantissement par la pauvreté et par la faim, est déjà
largement enclenchée, son espace vital de plus en plus rétréci et l’élimination
de son patrimoine immatériel et de sa mémoire minutieusement conduite. Le
silence de l’opinion internationale devient coupable et pèse lourd sur nos
consciences. L’isolement international du peuple palestinien s’accentue. Et son
errance et sa dépossession n’ont désormais plus de limites. Pour la survie du
peuple Palestinien, il faut agir et vite. Car, souvenons-nous, d’autres
génocides ont déjà eu
lieu !
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