Quand apprendrons-nous enfin à vivre avec tous les éléments constitutifs
de notre histoire. A revisiter cette Algérie à l’hospitalité légendaire qui a vu se
déployer en son sein tant de communautés et tant de populations et qui
aujourd’hui est plus que jamais terre d’Islam ? Quand regarderons-nous
avec lucidité et intelligence ce qui nous entoure ? Notre passé est ainsi jalonné
de séquences qui ont vu vivre Juifs et Chrétiens en Algérie. Ils y ont laissé une présence, des traces,
des vestiges et même un patrimoine immatériel encore aujourd’hui partagé. Pour ne
relater que les épisodes les plus récents, qui se souvient du Cardinal
Léon-Etienne Duval, archevêque d’Alger jusqu’en 1988, de son charisme, de sa
proximité et de son soutien à la cause algérienne qui lui ont valu menaces de
mort de la part des ultras de l’Algérie française qui le surnommèrent «Mohammed
Duval» et sous le règne duquel ont été cédées de nombreuses églises qui ont été
transformées en mosquées.
La présence en Algérie de l’église catholique est très
ancienne. Saint-Augustin l’Algérien, l’enfant de Souk-Ahras, en constitue l’une
des figures emblématiques dont les enseignements et la sagesse légendaires
rappellent parfois Confucius.
La communauté protestante est elle de constitution plus récente notamment dans sa composante algérienne. Cette dernière est souvent le fruit de conversions de musulmans, fragilisés socialement et désemparés, qui cèdent au prosélytisme et à l’activisme d’évangélistes notamment américains dont tout le monde connait la ferveur pour Israël et la proximité avec les organisations sionistes. Contrairement aux catholiques, les protestants n’ont pas d’histoire avec l’Algérie profonde ni d’ancrage et encore moins de proximité avec l’arrière pays.
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La communauté protestante est elle de constitution plus récente notamment dans sa composante algérienne. Cette dernière est souvent le fruit de conversions de musulmans, fragilisés socialement et désemparés, qui cèdent au prosélytisme et à l’activisme d’évangélistes notamment américains dont tout le monde connait la ferveur pour Israël et la proximité avec les organisations sionistes. Contrairement aux catholiques, les protestants n’ont pas d’histoire avec l’Algérie profonde ni d’ancrage et encore moins de proximité avec l’arrière pays.
La communauté juive d’Algérie a quant à elle rejoint dans sa
très grande majorité la France en 1962. Elle était la plus importante d’Afrique
du Nord et lorsque ses membres encore vivants se rencontrent aujourd’hui dans
l’hexagone, discutent où évoquent l’un des leurs, ils disent souvent à son sujet
qu’il est du Maroc où de Tunisie mais rarement d’Algérie. Ceux d’Algérie sont
les plus discrets car la séquence historique algérienne ne ressemble pas à
celle du Maroc, ni à celle de Tunisie et aura été la plus mouvementée. Durant
la colonisation française, les juifs d’Algérie ont été faits français grâce (où
à cause c’est selon) au décret Crémieux qu’ils ont négocié et obtenu. Ils se
sont distingués et par conséquent désolidarisés des autres algériens musulmans
et ont pris fait et cause pour la France coloniale. Certains firent même subir les pires sévices
aux algériens notamment ceux qui collectèrent des fonds où militèrent pour l’OAS.
Mais d’autres ont fait cause commune avec
le peuple algérien et combattirent pour l’indépendance de l’Algérie. Certains
ont aussi utilisé leur célébrité et leur notoriété d’intellectuel, en France et
dans le monde, pour dénoncer la torture en Algérie où refuser la conscription. La
douleur du souvenir de l’Algérie existe encore chez certains notamment en
France et aux Etats-Unis. Ils étaient en Algérie, Instits, étudiants, fonctionnaires
où commerçants comme ceux qui avaient leurs boutiques rue Bab Azoun, à Alger, où
qui exploitaient le commerce de négociants dans les fameuses voûtes de la pêcherie.
Si certains suscitent volontiers la sympathie et se lient facilement d’amitié, d’autres
provoquent la méfiance et l’exaspération car fervents sionistes et inconditionnels
d’Israël. Si les premiers demandent souvent de savoir ce qu’est devenu leur
quartier d’enfance, surtout les plus âgés qui avec leur parlé algérois et leur
façon particulière de se dire «Ya Tchoutch»
peuvent vous emmener revisiter l’Alger d’autrefois aux senteurs de menthe, de jasmin et d’oranger, d’autres par contre continuent
de clamer que l’Algérie n’a jamais existé et n’est qu’une invention de la
France coloniale. Un jour, un ami me
raconta que revenant de la mosquée de Paris, il décida de faire une promenade du
coté de la rue des Rosiers, célèbre artère commerçante de Paris située dans le
quartier du Marais. Ce lieu célèbre est connu pour abriter de nombreux artisans
et des boutiques appartenant à des juifs algériens. En rentrant dans l’une
d’entre elles pour voir de plus prés les petites sculptures en argent ornées de
pierres et de corail qui y étaient exposées, il fut accueilli par un homme, la
soixantaine passée portant Kipa et bretelles, qui lui expliqua que les modèles étaient
faits mains et étaient uniques. Il me précisa qu’en discutant avec lui, un autre
monsieur surgit de l’arrière boutique et lui dit «tu as le grand bonjour de
ceux de là-bas». Les propos qu’ils échangèrent entre eux révélèrent qu’il
s’agissait de proches à eux vivant encore en Algérie.
Cette anecdote permet d’introduire le
sujet qui nous intéresse et d’essayer de comprendre cette actualité
hypercomplexe, récurrente en Algérie depuis de nombreuses années, provoquée à
chaque fois par la supposée religion chrétienne où juive attribuée à telle où
telle personnalité algérienne connue et les multiples réactions passionnées,
déchainements sur les réseaux sociaux et autres débats ininterrompus qu’elle suscite
toujours. Il faut préciser à ce propos qu’il faut savoir être prudent et ne pas
décréter sous l’effet de la colère où de la passion où par un claquement de
doigts ce qu’est chacun d’entre nous dans ses convictions religieuses les plus
intimes. Et ne pas apporter du blé à moudre à ceux qui dans le monde font de la
lutte contre l’antisémitisme l’alibi pour justifier toutes les horreurs qu’ils
font subir au peuple palestinien, depuis sa dépossession de sa terre et de son
histoire jusqu’à la négation même de son existence.
Il existe en Algérie de nombreuses
personnes de confession chrétienne ou juive. Ces dernières ne s’affichent pas publiquement
et doivent peut-être et pour certaines d’entre elles pratiquer leur culte dans
la discrétion où le secret. De nombreux algériens juifs comptent parmi les
célébrités. Parmi eux, Jean Daniel, fondateur du Nouvel Observateur, natif de
Blida et qui vient d’être officiellement honoré en Algérie. Connu pour son
soutien à l’Algérie lors de la lutte de Libération nationale, ce dernier a évoqué
au cours de la cérémonie qui lui a été dédiée les maîtres qui, selon lui, l’ont
aidé plus tard, «pour apprendre et
comprendre ce qu’on peut appeler
l’arabo-islamisme » et a déclaré
«Je tiens à prononcer leurs noms ici, par fidélité. Ce sont d’abord Charles
André Julien, le professeur Jacques Berque, Charles-Robert Ageron et Maximo Vincent.
Ces noms ne vous disent rien, et c’est pour cela que je les prononce,
pour que vous les reteniez, car ils sont à l’origine de ce que nous sommes ici
ce soir, de ce que nous faisons». Myriam Ben, célèbre artiste peintre,
était aussi juive.
Le ressentiment qui existe en Algérie à propos d’Israël et du
sionisme, comme chez la majorité des
musulmans dans le monde mais aussi de chrétiens, est extrêmement lourd. Il est dans la façon dont est remise
en cause l’existence de lieux de cultes appartenant à ces deux grandes
religions monothéistes. Les musulmans disposent de lieux de culte sacrés en
Palestine que les colons juifs extrémistes veulent détruire. Il est aussi dans la
question palestinienne toujours non résolue, qui interpelle notre conscience et
provoque notre solidarité. Et la spoliation et l’errance du peuple palestinien depuis
1948 sont identiques à celles qu’ont
subies les juifs et ne sont toujours pas achevées. Mais il ne faut surtout pas être dupe, ni naïf et faire le jeu du
sionisme dont la prétendue lutte contre l’antisémitisme à en réalité toujours
constitué l’un des moteurs qui lui permet d’amplifier chaque jour son influence
dans le monde et de conquérir jusqu’à même les esprits et d’influencer en
permanence la pensée et la production intellectuelle. Ne pas oublier que des
attentats ont été parfois organisés contre des synagogues pour justifier toutes
les exactions infligées aux palestiniens. Mais ne pas oublier aussi que des Juifs
ont été bannis par Israël parce qu’ils ont dénoncé le sionisme et que d’autres
comme Jean-Pierre Elkabbach, juif algérien, a été un jour rejeté par les
membres de sa communauté pour avoir interviewé,
il était le premier à le faire, Yasser Arafat sur un média français. S’agissant
enfin de nous et de notre perception de notre vécu quotidien, il nous faut
cesser aussi de toujours chercher des alibis ailleurs, ni de faux-fuyants
d’ailleurs. Nous sommes les seuls responsables de notre situation actuelle et
ceux sont souvent les nôtres, comme vous et moi, qui depuis des décennies ont
malmené notre pays, pillé son économie, réprimé les voix discordantes qui s’y sont exprimées et
empêché l’émergence de l’Algérie qui aurait pu devenir cette véritable puissance économique dont
l’indépendance, faut-il encore le rappeler, a été chèrement reconquise. La
réalité est aussi là et nulle part ailleurs et n’en cherchons pas une autre.
Quand à ceux qui ont vraiment l’Algérie au cœur et qui le prouvent chaque jour
par leurs actes et leurs attitudes, peu importe qui ils sont car nous n’avons
pas de complexe à avoir. En Algérie, la population est musulmane dans sa plus
grande majorité. Armés de ce que nous
enseigne l’Islam, rien ne peut nous faire peur. Et en la matière et s’agissant
de nos rapports avec les Gens du livre, seuls les savants musulmans sont
habilités à donner un avis éclairé. Et rappeler à ceux qui continuent de tuer
les enfants palestiniens à Gaza et en Cisjordanie que les Juifs qui quittèrent un
jour l’Espagne furent accueillis en Afrique du Nord, où ils trouvèrent refuge
auprès des musulmans. Et relater aussi cet épisode significatif de la tradition
de notre prophète, Paix et Bénédiction d’Allah sur lui, qui un jour ne voyant
plus venir son voisin Juif déposer comme
de coutume des détritus devant sa porte
n’hésita pas à aller s’enquérir de son état de santé pour comprendre les raisons
de son absence. Il le trouva malade et
lui fit prodiguer les soins nécessaires et le compta plus tard parmi les
convertis à l’Islam.
Je me remémore aussi cet ami, diplômé
d’une des plus grandes universités américaines, qui vit actuellement dans un
pays du Golf, qui me parla un jour de
ses employeurs, autrichiens dont les parents ont fui le Nazisme et qui sont
devenus citoyens des Etats-Unis. Je lui ai demandé de m’expliquer comment se
fait-il qu’avec tout ce qu’il m’a appris et enseigné, il travaille pour des employeurs qui financent peut-être Israël et
la répression du peuple palestinien. Il me répondit que notre guide, le prophète de l’Islam, Paix et bénédiction d’Allah
sur lui, entretenait des relations commerciales avec des commerçants juifs et
de conclure «comment pourrai-je prétendre moi, citoyen ordinaire que je suis,
faire mieux que lui ?».
Alger est paisible. Notre Dame d’Afrique,
cathédrale majestueuse et réplique de la basilique du Sacré-Cœur à Paris,
surplombe le quartier de Bologhine (Ex Saint-Eugène) et la sublime baie
d’Alger. Elle dédie ses prières en écho à celles de Sidi Abderrahmane aux
marins et aux pêcheurs pour qu’ils reviennent sains et saufs dans leurs foyers
et qu’ils ne soient jamais engloutis par les flots.

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