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Propos, médisances et autres amabilités bien de chez nous

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Note de l'auteur
Cet article a été publié pour la première fois le 01 janvier 2014.

Ne dit-on pas que charité bien ordonnée commence toujours par soi-même. Alors en la matière c’est-à-dire en termes d’errements sémantiques réels ou supposés, devrais-je  plutôt commencer par moi-même. N’étant ni journaliste de profession, ni écrivain, il m’arrive parfois d’écrire juste ce que je ressens. Un jour ayant sans doute un peu dépassé les limites permises, concept totalitaire toujours en cours en Algérie et en Corée du Nord comme on me le fera remarquer avec force dans un train de banlieue, en écrivant un texte intitulé La République Dévoyée [I], je pris aussi  sur moi pour toute une corporation à laquelle je n’appartenais pas et j’eus à subir les griefs qui étaient principalement retenus contre elle où du moins contre ses membres les plus libres et les plus sincères. Et à propos de limites permises, non pas politiques mais plutôt celles relevant  de la bienséance et s’agissant de notre  propos,  je soumis, il n’y pas très longtemps de cela, à un journal en ligne français un texte pour publication. Je reçus de la part du rédacteur en chef une correspondance dans laquelle il me demandait de commenter une phrase contenue dans mon texte qui lui sembla ambiguë et qu’il proposa de remplacer par une autre qu’il me suggéra. Il m’écrivit ceci : une phrase de votre article provoque débat au sein de la rédaction. Cette phrase est "Beaucoup d’intellectuels juifs, libres et antisionistes et qui ne squattent pas à l’année comme certains le font les plateaux de télévision » que certains proposent de modifier en «Beaucoup d’intellectuels juifs, libres et antisionistes, et qui ne squattent pas à l’année les plateaux de télévision, comme certains». Je lui répondis que le changement qu’il proposait de faire ne posait pas de problème particulier, bien qu’il portait en soi atteinte à l’intégrité du texte publié par ailleurs tel quel en Algérie,  en mentionnant au passage que je n’en saisissais pas toute la subtilité.


 Je devinais néanmoins que mon interlocuteur  était vexé et que je devais probablement représenter pour lui une énième personne qui sous prétexte de récuser le sionisme cachait en réalité une viscérale haine antisémite. Rien de tout cela n’était bien entendu vrai car devrais-je moi-même sombrer dans les eaux nauséabondes de la haine comme le faisaient ceux que je prétendais dénoncer dans ce texte ? Et devrais-je aussi retourner la question et demander s’il fallait sous prétexte de lutte contre l’antisémitisme taire les crimes les plus abjectes commis au nom du sionisme ? Et ne pas dénoncer ceux qui soutiennent aveuglément le dernier Bantoustan qui existe encore sur terre. Notre échange de correspondances  ne se poursuivit pas.  




Un autre écrit dédié à l’Afrique et aux convoitises que ne cesse de susciter ce continent interpella un lecteur qui me gratifia d’un  commentaire cinglant en m’assénant les remarques suivantes : «C’est un peu fatiguant de voir les algériens jouer  aux africains quant on connait leur racisme viscéral de blanc envers les noirs. On n’a franchement pas besoins d’analyses d’arabes là où nos intellectuels connaissent mieux le sujet ». Et de poursuivre «Aussaresses n’a rien à voir avec l’Afrique noire. Il a sévi en Algérie au moment de la guerre au Cameroun. Que les algériens n’effacent pas notre histoire  en faisant croire que seule l’Algérie fut colonie française alors que nous le restons». Rien que cela et cette imagination débordante me déconcerta. Je répondis à mon interlocuteur en invoquant la légendaire générosité de l’Algérie et son hospitalité qui profitèrent à bien des membres de ce continent. Mais soit. Je venais d’apprendre que j’appartenais à un peuple raciste qui n’aimait pas les personnes de couleur. Pour déconstruire dans mon imaginaire cette terrible sentence que je n’acceptais pas, je me mis à sourire en pensant au présentateur vedette de notre «JT national» où encore à mes collègues de travail et à tous ces algériens, noirs de couleur, qui vivaient en paix en terre d’Islam, chez eux en Algérie.  Je dois reconnaître cependant et comme partout ailleurs dans le monde que la parole bête et méchante se libère malheureusement aussi en Algérie où chacun y va désormais de sa petite louche de haine,  de méchanceté et d’intolérance qui pour son voisin, son chef, ses collègues où pour ceux qu’il n’aura pas connu et qu’il ne connaitra sans doute jamais.  Tout a été déjà dit et entendu. Ainsi à propos d’un potentiel candidat à l’élection présidentielle, un cadre dirigeant dans une entreprise publique, originaire du sud,  n’hésita pas à contester cette ambition en m’expliquant «qu’il n’était pas algérien mais un janjaoui en référence à ses tenues vestimentaires».
Un autre à propos de l’autoroute est-ouest : «regardez comment le tronçon ouest est nickel alors que celui de l’est est devenu un véritable traquenard meurtrier pour de nombreux automobilistes»
Un pédagogue et non moins enseignant énonça à propos du M’zab,  à l’occasion des événements malheureux qui ont secoué la ville de Ghardaia, que «cette région est selon lui une enclave juive,  le refuge d’une ancienne communauté qui a fui la persécution pour s’abriter dans le désert et qu’il n’y a ni Ibadisme et ni racines berbères». Un autre inculte qui profère à propos des Kabyles et des Chaouias : «ce sont d’anciennes tribus chrétiennes qui empêchent l’Algérie de se développer ». Et de nuancer son propos d’ «historien» en précisant qu’une région réputée pour ses  bijoux en argent ne serait, selon lui,  « que détentrice d’un métier qu’affectionnent particulièrement les juifs » oubliant au passage que cette région était d’abord réputée pour son armurerie avant que le colonialisme français ne s’en aperçoive et ne l’interdise. Où ce sectaire aux lunettes rondes qui propose tout simplement de «renvoyer les arabes en Arabie». Et cet autre illuminé qui assène à propos de l’ouest de l’Algérie : «contrairement à d’autres, cette région n’a pas participé activement à la résistance au colonialisme et à guerre de libération nationale» occultant l’épopée de l’Emir Abd El Kader, la réalité des fiefs combattants  de  l’Ouarsenis, la résistance du sud-ouest et les sévices de l’OAS infligés à la ville d’Oran et tout le reste. Et enfin ce témoin de retour d’une «zone de troubles et de contestation» scandalisé d’avoir entendu des manifestants, sans doute abusés par le clientélisme local, proclamer avec virulence «leur  refus de voir des étrangers,  ces algériens venus d’autres régions d’Algérie,  venir habiter dans leur quartier».
Ces comportements sont ceux d’algériens, de toutes catégories sociales,  lettrés  où pas et qui ne sont pas toujours ceux que l’on croie. La misère sociale, la pauvreté et la mal vie qu’il faut combattre avec force ont toujours constitué partout dans le monde le réservoir dans lequel ont puisé avec satiété les tenants  de tous les fascismes et ont souvent fait le lit des plus grandes dictatures. L’Algérie recèle d’immenses richesses qui sont très mal réparties et parfois même confisquées. La promotion sociale, le développement humain et  la construction de véritables perspectives de lendemains meilleurs constituent le meilleur antidote contre la haine et le meilleur attelage du vivre ensemble. Cela permet aussi de ne laisser personne sur la marge.
Le régionalisme et la corruption ont hélas constitué depuis très longtemps les deux moteurs de la gouvernance en Algérie et ont été utilisés sans modération par tout le monde. Que l’on ne s’étonne pas alors que des propos inconcevables, condamnables et inimaginables il ya de cela quelques années soient devenus ordinaires et se banalisent avec tout ce que cela peut engendrer comme danger à court terme pour la cohésion de la communauté nationale et comme risques potentiels de dislocation de notre pays.
Dans cette Algérie ou l’on ne sait parfois plus coexister ensemble et où chacun vit reclus dans sa région, sa ville, son quartier sans jamais chercher à connaitre l’autre et où ceux dont la mission était de montrer la route ont failli et ont souvent joué aux apprentis sorciers, l’Islam seul continue d’être  aujourd’hui le fédérateur  de toutes les différences qui donne du sens à un vivre ensemble qui subit lui aussi les effets de l’air du temps. Il constitue aussi le dernier rempart contre le déferlement de ce magma monstrueux, mélange explosif de frustrations sociales, de misère, d’injustice, de rancœurs longtemps contenues, de  brimades subies qui pourrait faire demain le lit de ces grands malheurs qui viennent. Que Dieu nous en préserve.
[I] De nombreux journaux et sites reçurent cet article à l'époque. Seuls Le Quotidien d'AlgérieAlterinfoLe Quotidien d'OranNadorCulture et L'Echo de Jijel le publièrent.

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